ON A VU

SUR SCÈNE ET AU CINÉ

LA NEWSLETTER hebdomadaire

jeudi 3 octobre 2024

Par les mots des écrivains comprendre les bleus à l’âme de la nature humaine. Par la voix du blues, exprimer les maux enfouis en chacun de nous. Pour y découvrir – peut-être – les racines de nos émotions


  LA PHRASE

« Un oiseau peut chanter à Kaboul, mais pas une fille. » Meryl Streep défendant le droit des femmes afghanes dans un discours fort à la tribune de l’ONU.


 LE CHIFFRE

 4820

Le nombre d’abonnés à Blues & Polar sur le réseau Linkedin


OCTOBRE

 L’INTERVIEW 3 QUESTIONS À… FABIENNE BOULIN-BURGEAT

L’invitée d’octobre de Blues & Polar pour l’Interview 3 Questions à… est Fabienne Boulin-Burgeat fille de l’ancien ministre du Travail Robert Boulin retrouvé mort dans un étang de Rambouillet en octobre 1979 et dont une révélation récente d’un témoin repenti affirme – ce que l’on a toujours pensé à Blues & Polar - qu’il a bel et bien été assassiné puis jeté dans l’étang du Rompu à Rambouillet… et ne s’est pas suicidé ! Bien trop de preuves ont été volées et supprimées au cours de l’enquête et la 2e autopsie du corps de Robert Boulin a révélé toute la manipulation incroyable mise en place sur sa dépouille. Bref, le combat de sa fille qui a commencé avec son livre « Le Dormeur du Val » ayant obtenu le Prix Blues & Polar /Comtes de Provence en 2011 va peut-être (et enfin, on l’espère) connaître son épilogue. Car les preuves d’une forte intimidation et d’un assassinat (non-prévu ?) s’accumulent de plus en plus. En revanche, la question reste : qui a commandité ce guet-apens qui aurait tourné en crime d’Etat ? La justice poursuit sa mission.

1. BLUES & POLAR. Fabienne, comment avez-vous pris connaissance de l’existence du témoignage d’un témoin de dernière minute diffusé sur France 2 dans l’émission de Laurent Delahousse 13h 15 le dimanche qui confirmerait l’hypothèse de l’assassinat de votre père le 30 octobre 1979 ? Par la Justice, votre avocate, la télévision ou par cet homme ?
FABIENNE BOULIN-BURGEAT. « Tout d’abord, c’était une remarquable émission sur le fond d’une affaire d’Etat, de par sa longueur et ses explications. Et je suis d’ailleurs étonnée et surprise, en revanche, que très peu de médias aient réagi à la suite de cette diffusion pour en faire un prolongement. Mais pour ce témoignage recueilli par Marie-Pierre Farkas pour France 2, c’est moi, qui à la fin de l’été a vu passer sur facebook le témoignage d’un type qui écrivait « avoir été interrogé à Versailles dans le cadre de l’Affaire Boulin ». J’ai trouvé ça bizarre, mais comme je suis toujours très attentive à ce qui paraît sur mon père, j’ai fouillé un peu… Mais quand j’ai su que cette rencontre avait eu lieu 8 mois auparavant avec la juge chargée de l’Affaire sur la mort de mon père, qu’elle ne m’avait rien dit et m’avait caché ce témoin de dernière minute, je suis allée la voir à Versailles. En fait, ce témoin que je ne connais pas, n’ai jamais rencontré, et qui est très malade, souhaite soulager sa conscience, et il faisait tout ce qu’il pouvait pour faire connaître son témoignage sur le pseudo assassinat de mon père qui ne s’est jamais suicidé, et il a appelé de nombreuses personnes. Et notamment un type à Libourne que je connaissais et qui m’a ensuite appelée. Moi je ne voulais surtout pas avoir de contact avec cet homme pour la régularité de l’enquête car dans ses révélations, il parle de mon père transporté à l’étang du Rompu à Rambouillet, mais aussi de 5 crimes commis sur d’autres personnes. Marie-Pierre Farkas, fille du grand journaliste Jean-Pierre Farkas, elle-même journaliste à la retraite mais grande spécialiste de l’Affaire Boulin a interrompu ses vacances pour avoir un contact avec ce témoin et a réalisé le sujet qu’on a vu sur France 2 chez Laurent Delahousse. Et après vérification, tout ça se tient. Le Procureur a donc dit à la Juge « Tout ça devrait vous intéresser. » J’espère donc que ça va évoluer ! »

2. BLUES & POLAR. Cette déclaration d’un témoin sur un passage à tabac ayant mal tourné dans un lieu discret, mais proche du fameux club échangiste « Le Roi René » à Ville d’Avray - rendez-vous interlope très connu des politiques, des flics et des voyous, aujourd’hui fermé - vous inspire quoi ?
FABIENNE BOULIN-BURGEAT « J’ai 44 ans de combat pour la vérité sur la mort de mon père et 44 ans au beau milieu des hommes politiques corrompus et des mafieux. Le Roi René c’était un lieu où mon père n’est jamais allé mais où le Tout-Paris de la politique, du cinéma, de la télévision, du spectacle… se réunissait. Le témoin en question habitait en face du Roi René à Villle d’Avray et il rendait des services. Et comme il était souvent sur place, il entendait de nombreuses conversations… Et à l’époque, les gars du fameux SAC (Service d’action civique) sorte de garde prétorienne au service du général de Gaulle étaient souvent présents. Le témoin prétend donc avoir entendu une conversation des assassins de mon père parmi lesquels un ancien catcheur aujourd’hui décédé, qui l’auraient battu à mort dans un petit village nommé Galluis, dans les Yvelines, non loin du Roy René. Et ils l’auraient ensuite jeté à l’eau. On est donc loin d’un suicide ! »

3. BLUES & POLAR. Et maintenant ? Est-ce qu’enfin on va connaître la vérité ?
FABIENNE BOULIN-BURGEAT : « Pour l’instant, la Juge qui s’apprêtait à fermer le dossier a dit C’est minuit moins une ! Donc, la Justice se sent obligée d’enquêter sur le témoignage de cette personne. C’est mon avocate Marie Dosé qui suit tout ça car ce témoin est très important. Il faut bien se souvenir que dès le départ l’enquête a été sabordée. Les premières photos du corps prises par la Gendarmerie ont été voilées au développement. Tout est faux. J’ai réussi à organiser une reconstitution citoyenne (ci-dessous) qui n’a aucune valeur juridique mais les deux médecins-légistes présents affirment via les photos de l’époque que mon père a reçu des coups violents à la tête… et qu’il n’a pas pu se faire ces blessures tout seul en se suicidant. Tout est faux et j’aimerai qu’on affirme déjà que rien ne prouve le suicide. J’espère que la vérité éclate et qu’une véritable enquête soir faite.
Beaucoup de gens sont morts depuis le 29 octobre 1979, mais il y a encore beaucoup de monde à interroger. Le Secrétaire de l’Elysée Claude Guéant qui était de permanence le soir de la mort de mon père n’a jamais été interrogé à ce sujet. Plein de gens savaient déjà à 2 heures du matin, bien avant l’annonce officielle du « suicide » de mon père, qu’il avait été tué. Tout ça n’a rien à voir avec la gauche ou avec la droite, et on ne veut pas que ça se sache ! A l’époque, dans l’appareil d’Etat, le SAC via l’OAS, avait pris une part importante comme un système mafieux à l’intérieur du régime. C’est un vrai roman policier ! Mais on ne m’entend pas ; on ne m’écoute pas ! Toute la vérité ? Je ne sais pas ! Mais je veux savoir qui était - et est encore peut-être – derrière tout ça. Pendant ces 44 ans d’omerta, il y a eu beaucoup de personnes mouillées à divers niveaux (vols de preuves, disparitions, dossiers égarés…) et elles doivent assumer leur responsabilité. Cette émission de Laurent Delahousse réalisée avec Marie-Pierre Farkas était absolument remarquable. Elle doit faire bouger les choses ! »
Propos recueillis par Jean-Pierre Tissier


 DEUIL

 KRIS KRISTOFFERSON REJOINT LES ÉTOILES

On a appris le 28 septembre avec tristesse la mort du chanteur et acteur Kris Kristofferson à l’âge de 88 ans. Je le connaissais peu en dehors de quelques images de sa participation compliquée électriquement au festival de l’ile de Wight, mais grâce aux deux spécialistes amis de la musique américaine sur Linkedin (Jean-François Convert (journaliste culture sur France Culture et France info) et Jean-Marie Douau (Americana french Gateway) j’ai découvert les Highwaymen composés des étoiles : Willie Nelson, Johnny Cash, Waylon Jennings, et Kris Kristofferson ! Une formation inconnue pour moi et qui m’a impressionné au plus haut point, autant que mes « fabulous four » adorés que sont David Crosby, Stephen Stills, Graham Nash et Neil Young. « Les Highwaymen prennent peu à peu la route des étoiles souligne Jean-Marie Douau dans son post sur Linkedin. Willie Nelson reste le dernier des mousquetaires. » Reconnu outre Atlantique comme l’un des plus grands songwriters, Kris Kristofferson a inspiré et écrit pour Johnny Cash et Bob Dylan. Il est plus connu en France comme acteur dans trois films de Sam Peckinpah, mais il a tourné aussi avec Scorsese, Rudolph, Sayles et dans la série des Blade. « Il me semble que mon plus lointain souvenir de Kris Kristofferson remonte à son rôle dans « Le convoi » écrit Jean-François Convert, journaliste et excellent guitariste. Un film de Sam Peckinpah sorti en 1978, où le chanteur-acteur joue aux côtés d’Ali McGraw. Poursuites, cascades, gros camions et musique country, c’est en gros ce que je me rappelle... Je crois l’avoir vu dans la langue de Goethe lors d’un séjour chez mon correspondant allemand à Francfort au milieu des années 80… https://lnkd.in/e5rn8N9i
Plus tard, j’ai vu le célèbre western « Pat Garrett and Billy the Kid » du même Sam Peckinpah, sorti lui en 1973. Et c’est bien sûr dans ce film que figure la non moins célèbre chanson de Bob Dylan « Knockin’ on heaven’s door » que j’ai examinée « à la loupe » dans une chronique publiée en mars 2020, pendant le confinement : https://lnkd.in/dZQGbrS
Et c’est encore plus tard que j’ai découvert sa carrière musicale de chanteur country. Je remarque qu’il a été marié à Rita Coolidge, chanteuse et actrice et qui aurait composé le fameux final musical de la chanson « Layla », mais crédité au batteur Jim Gordon. » https://lnkd.in/eMS_-Vq Reposez en paix Kris !
The Highwaymen Highwayman (extrait de l’album American Outlaws en live à Nassau Coliseum en 1990). Le temps passe trop vite…
https://youtu.be/bMdeg-WKt1U?si=qjsq_-gHihzjaScd

 LES « VIDÉOS BLUES LIVE » DE JPT

Rory Gallagher « Tore Down » (1972) Savoy Limerick
https://youtu.be/STJXh3h480k?si=zY4L4qKEmuTkhTyN

Luther Allison - It Hurts Me Too at Montreal International Jazz Festival (1997)
https://youtu.be/5MqYPyRkcNs?si=GvDNyXEnAtm2QdJ6

Éric Clapton & Sheryl Crow & David Sandborn (sax) Little Wing de Jimi Hendrix
https://youtu.be/53DBk4wufLc?si=RSASzN5av2ytS36N


ON THE ROAD AGAIN...KATEPI BLUES BAND. « LE BLUES DE CHEZ NOUS !  » Exit la Marque jaune et le LMJ blues band reformé en 2023 pour le 19e festival Blues & Polar. La formation est devenue un trio désormais appelé KATEPI Blues band. "On a fait plus de 20 dates cet été m’a expliqué hier le guitariste ami de Puimoisson Pierre Monteils, et on continue à chercher des lieux et manifestations. Notre projet « blues de chez nous » a bien été apprécié. Contact : katepiband@gmail.com Lien : https://www.youtube.com/@Katepibluestrio
GROUND ZERO nous emmène sur l’autoroute blues-rock-Americana, de Detroit à Austin jusqu’au Mississippi. Le groupe tisse des liens entre le blues et la musique américaine, entre reprises et compositions plus personnelles. Ces 4 musiciens enracinés dans le blues du delta et le rock du sud, ne sont pas des inconnus. Chacun d’eux a fréquenté les plus belles scènes et les grandes salles et au gré d’une rencontre, ils ont décidé d’allier leurs expériences pour un beau projet. Ground zero, c’est Sib Blues (guitare/chant avec Coup d’Blues, Purple Blues, The Crossroad Guy) ; Guillaume Massy (Guitare) avec Sarah James , Mr Tchang, Limmie & the Blue Beat) ; Georges Jacobs (batterie avec Jimmy & the Crazy Hearts) et Eric Courier (basse avec Little Mouse & The Hungry Cats, The Strickers). Contact : Eric Courier. Tel 06 87 32 74 27. Email : eric@whatprod.fr Hommage à Calvin Russell.https://youtu.be/LVUsO8sgDU0?si=2_lPDjXZZkFnjLFZ

 ALBUMS

 NOUVEAUTÉS JAZZ

DJANGO du Baptiste Herbin trio.
Baptiste Herbin (saxophones), Sylvain Romano (contrebasse), André Ceccarelli (batterie). Sortie le 11 octobre 2024. (L’Autre Distribution) Label : Matrisse Productions. Si la musique de Django Reinhardt a maintes fois été revisitée, pour ce tout nouvel opus, le sax Baptiste Herbin glisse ses pas dans ceux du virtuose manouche en s’imposant un véritable défi : la formule du trio saxophone, contrebasse, batterie. De Sylvain Romano émane un son de contrebasse profond et une clarté harmonique qui, naturellement, imposent l’essentiel. Quant à André Ceccarelli, c’est une signature incomparable, une vivacité folle et surtout un cœur énorme, qui s’offre tout entier à la musique. Ainsi, dans la nudité du trio, rien ne manque et tout se montre limpide. Baptiste se révèle d’une exceptionnelle profondeur, son incomparable virtuosité faisant place à une expression libérée du toute volonté, qui révèle tel un diamant brut, l’essence de la musique. Concerts : 5 octobre à Noyons Jazz Festival. 23 octobre Jazz en Tête Festival à Clermont-Ferrand. 31 octobre, 1er et 2 novembre au Sunside à Paris.

* COUP DE CŒUR. SARA SMILE. Rumer (live at Rivoli Ballroom]. Merci Viv Neuder du tuyau sur LinkedIn.
https://youtu.be/1Eb4tlLbdaE?si=poZL_8_MKTyK0cWv

AVISHAI COHEN « BRIGHTLIGHT » Sortie le 25 octobre 2024 (Naïve - Believe). Dans son nouvel album « Brightlight », Avishai Cohen met en valeur ses multiples talents aux côtés d’un ensemble de jeunes musiciens brillants dont lla batteuse Roni Kaspi et le pianiste Guy Moskovich, qui forment son trio de base. Ils apportent une vigueur et une fraîcheur à l’album en insufflant un sentiment de spontanéité et de dynamisme à la musique. Après plus de trois ans de tournée avec Avishai Cohen, Roni Kaspi a même un titre dédié (« Roni’s Swing »), écrit en hommage à son jeu de batterie dynamique et énergique. Guy Moskovich, pianiste dont la sensibilité harmonique et les prouesses techniques lui ont valu d’être reconnu comme une étoile montante du jazz, complète parfaitement les lignes de basse de Cohen. Yuval Drabkin, au saxophone, ajoute une autre couche de richesse à l’ensemble. Son jeu émotif et ses interprétations nuancées apportent une voix convaincante au projet, renforçant la profondeur générale de l’album. Concert unique en France le 21 novembre 2024 à l’Olympia (Paris.)
La formation : Avishai Cohen (Contrebasse & Voix) Guy Moskovich & Eden Giat (Piano) Roni Kaspi & Noam David (Batterie) Yuval Drabkin (Saxophone) Yosi Ben Tovim (Guitare) Lars Nilsson (Trompette)Hilel Salem (Bugle) Jakob Sollerman (Trombone) Ilan Salem (Flutes) Jenny Nilsson (Voix)


 ON A VU À L’ÉGLISE-HAUTE DE BANON (04)

L’ENSEMBLE VOCAL LA MESCLA : DES VOIX FLAMBOYANTES QUI SOURIENT EN CHANTANT

Elles chantent (avec deux voix d’hommes faisant office de basse) ces chants anciens et populaires transmis de bouche à oreilles via cette culture de l’oralité bien particulière au bassin méditerranéen. Et au-delà des cultures différentes, elles ont fait résonner des sons et des postures communes allant de la Sicile à la Grèce en passant par la Bulgarie, la Jordanie et bien d’autres ; du travail du blé à la cuisine familiale en passant par le raccommodage des voiles des pêcheurs et leurs filets. Particularité de La Mescla, ces choristes au regard ourlé de joie, sourient avec leurs yeux en chantant et dix-sept sourires animés, ça frappe et hypnotise, car ce n’est pas si courant. Sous la direction de la flamboyante Julie Charpentier, l’Ensemble vocal La Mescla (à l’image du mesclun niçois mélangeant les jeunes pousses de plusieurs variétés de salades des champs) nous a fait voyager avec bonheur sous les voutes anciennes et à la belle acoustique de l’Eglise-Haute de Banon. Chants de femmes principalement, mais aussi la chanson - interprétée en Occitan - du « Prisonnier de Forcalquier » si chère à Renat Sette, voix d’or d’Oc et de Haute-Provence et à Jean-Yves Royer. Malgré le mistral glacial sur les hauteurs de la cité du fromage, la chapelle était pleine pour ce concert vivifiant évoquant la mémoire des peuples de Méditerranée, leurs joies mais aussi leurs tourments. Comme si on chantait au présent… Rien de nouveau sous le soleil !"

Jean-Pierre Tissier


  AU CINÉMA

  **** LES GRAINES DU FIGUIER SAUVAGE de Mohammad Rasoulof

Durée : 2h 53mn. Sorti le 19 septembre 2024. Prix spécial du jury du festival de Cannes. Avec Misagh Zare, Soheila Golestani, Mahsa Rostami… Le résumé. Iman vient d’être promu juge d’instruction au tribunal révolutionnaire de Téhéran quand un immense mouvement de protestations populaires commence à secouer le pays. Dépassé par l’ampleur des évènements, il se confronte à l’absurdité d’un système et à ses injustices mais décide de s’y conformer. A la maison, ses deux filles, Rezvan et Sana, étudiantes, soutiennent le mouvement avec virulence, tandis que sa femme, Najmeh, tente de ménager les deux camps. La paranoïa envahit Iman lorsque son arme de service disparait mystérieusement...
« Condamné à huit ans de prison début mai en Iran, le réalisateur iranien Mohammad Rasoulof a fui son pays peu après avoir reçu le Prix spécial du jury au dernier Festival de Cannes pour « Les graines du figuier sauvage ». Thriller familial et politique à la fois, ce film magistral nous entraine dans l’Iran d’aujourd’hui et sa République islamique au sein d’une famille où le père sous des côtés paternalistes avec ses deux filles est sur le point d’avoir une promotion politique. Mais laquelle ? Procureur ou Juge présume son entourage sans se douter que le poste devient de plus en plus chaud et dangereux à l’heure où les Iraniennes crient « Femmes ! Vie ! Liberté ! » dans les rues de Téhéran depuis la mort de Mahsa Amini, le 16 septembre 2022. Conséquence tragique d’un port de voile non en accord avec les principes jusqu’au-boutistes de cet islam absurde dans sa rigidité d’un autre temps… On reste ainsi scotché pendant trois heures, sans s’ennuyer un seul instant, tant l’on pénètre intimement dans la vie de cette famille où la bague des « Gardiens de la Révolution » scintille comme un leitmotiv de l’acceptation du pire à la main du père, mâle « tout-puissant » poilu, barbu, mais sans cœur ni âme ! Et qui accepte de se soumettre. Car pour les hommes, c’est beaucoup plus facile et lucratif… Sauf au moment où il faut prendre des décisions capitales dans tous les sens du terme ! Dans un pays – comme tant d’autres au Proche et Moyen Orient - dirigé par la religion islamique et où le mot laïcité n’existe même pas, ces conflits familiaux carrément jusqu’au-boutistes vont causer d’énormes dégâts dans cette société où les jeunes femmes qui pianotent sur les réseaux sociaux avec le monde entier ne comprennent pas – et vraiment plus du tout ! – qu’on leur refuse de s’habiller, se coiffer et se vêtir comme elles veulent. Un film magistral qui interpelle aussi la France où insidieusement des partis politiques et des Islamistes qui y vivent voudraient y imposer cette vision archaïque du monde où jamais les mots amour, cœur, partage, humanité, liberté, fraternité et sororité ne sont prononcés une seule fois. »

Jean-Pierre Tissier

  **** LE FIL de Daniel Auteuil

Sorti le 11 septembre 2024. Avec Daniel Auteuil, Grégory Gadebois, Isabelle Candelier, Gaëtan Roussel, Alice Bellaïdi, Sidse Babett Knudsen…
Le résumé Depuis qu’il a fait innocenter un meurtrier récidiviste, Maître Jean Monier ne prend plus de dossiers criminels. La rencontre avec Nicolas Milik, père de famille accusé du meurtre de sa femme, le touche et fait vaciller ses certitudes. Convaincu de l’innocence de son client, il est prêt à tout pour lui faire gagner son procès aux assises, retrouvant ainsi le sens de sa vocation.
« Daniel Auteuil possède beaucoup de cordes artistiques à son arc personnel. Acteur, réalisateur, puis chanteur désormais, il dirige cette fois son 6e film qu’est « Le Fil » en tirant toutes les ficelles de la réalisation et du jeu puisque c’est lui qui tient aussi le rôle principal aux côtés du remarquable Grégory Gadebois… Dire d’une affaire ou d’une vie, qu’elle ne tient qu’a un fil est parfois exagéré tant ce fil qu’on juge fin et si fragile est au contraire ténu, solide et loin de casser malgré le poids des éléments défavorables. Alors qu’il suffit de tirer doucement et patiemment dessus pour que l’écheveau se mette à tourner et se dénoue ; laissant place à une explication surprenante et effarante. « Le Fil » qui est tiré d’une histoire vraie s’étant déroulée dans le Nord de la France a été transposé en Camargue, à Mas-Thibert, et le film est à l’image de ce passionnant thriller qui fait la part belle à une palette de comédiens impeccables autour de Daniel Auteuil et Grégory Gadebois. Ainsi, Alice Belaïdi (l’avocate générale) dont on se souvient qu’elle est d’abord issue du théâtre et Gaëtan Roussel chanteur de Louise Attaque (en patron de bar) sont parfaits dans l’incarnation de leurs personnages tandis que la juge (Isabelle Candelier) et Sidse Babett Knudsen (avocate) sont à l’unisson. Malgré les 1h 55mn, on se laisse facilement emporter par le côté bonhomme du père de famille (Grégory Gadebois) arrêté au beau milieu du repas, pour le meurtre de sa femme - alors qu’il sert des pâtes à ses enfants - avec une bonne foi évidente. Et on attend son innocence clamée et reconnue par l’intime conviction des onze jurés de la Cour d’Assises. L’histoire en décidera autrement et c’est là que tout commence ! Tant que le fil de l’écheveau n’est pas entièrement dévidé, il y a toujours une place pour l’inattendu. Et là il sera conséquent ! Voilà un très bon polar qui nous replace dans le quotidien ordinaire des tribunaux de province où l’émotion est toujours palpable, car on est dans la justice de monsieur tout-le monde. »

Jean-Pierre Tissier

  **** ÉMILIA PEREZ DE JACQUES AUDIARD

Sorti le 21 août 2024.

Le résumé. Surqualifiée et surexploitée, Rita use de ses talents d’avocate au service d’un gros cabinet plus enclin à blanchir des criminels qu’à servir la justice. Mais une porte de sortie inespérée s’ouvre à elle, aider le chef de cartel Manitas à se retirer des affaires et réaliser le plan qu’il peaufine en secret depuis des années : devenir enfin la femme qu’il a toujours rêvé d’être.
« Une fois encore, Jacques Audiard nous entraine dans un univers inédit au sein de ses réalisations via l’OVNI cinématographique que représente cet « Emilia Perez » sélectionné à Cannes où il a raflé le Prix du jury et le Prix d’interprétation féminine décerné pour la première fois collectivement à ses quatre actrices. Car si l’histoire nous parait dingue au départ avec ce narco-trafiquant mexicain milliardaire baraqué comme un déménageur qui veut devenir femme, on est très vite entrainé dans une course folle à la transformation physique sans limites, en empruntant des routes tortueuses, mystérieuses et violentes, comme il sied au Mexique.Le tout nous laissant des étoiles filantes dans les yeux tant la forme du film est du « jamais vu ». On est tantôt dans une comédie musicale alliant rap et hip hop, tantôt au cœur de chansons qui nous parlent, mais dont la géniale chanteuse Camille et son compagnon Clément Ducol ont transformé le rythme et les paroles finissant sur du Brassens entre corazon et west side story.. Un film magnifique et éblouissant dont on sort heureux bien que violent façon western spaghetti d’aujourd’hui. Passer du Prophète à Emilia Perez via De rouille et d’os » et « De battre mon cœur s’est arrêté » atteste de la richesse de la palette cinématographique de Jacques Audiard. Formidable !"

Jean-Pierre Tissier

Émilia Pérez - Bande-annonce officielle HD.
https://youtu.be/lwH9f1jmkBc?si=YqOgIE2z3l17QrEe


  SORTIR... LA SÉLECTION DE BLUES & POLAR


 MARDI 8 OCTOBRE

AIX-EN-PROVENCE. KATIA & MARIELLE LABÈQUE au Grand Théâtre. Ravel, Schubert, Glass. Les deux « sœurs au diapason » (La Croix) du piano français proposent un programme de réinterprétations et d’œuvres originales qui leur ressemble. Depuis quatre décennies, elles défendent sur les cinq continents le passionnant répertoire à quatre mains sur un ou deux pianos. Les deux sœurs au diapason (La Croix) du piano français proposent un programme de réinterprétations et d’œuvres originales qui leur ressemble. Le Grand Théâtre de Provence 380 avenue Max Juvénal 13100 Aix en Provence.


 TERROIR

LES TOQUÉS DU SUD émission présentée par Bruno Klimis sur YouTube vous propose la recette d’un Curry végétal au yaourt par le Chef Jany Gleize de La Bonne étape (*) à Château-Arnoux.
https://youtu.be/Ii5Y2KDlKJI?si=IQHHMOUzXSkH10yf


 ON A LU

Parce qu’un livre n’a pas d’âge et ne se démode jamais.
Nos impressions * MOYEN ** BIEN *** EXCELLENT **** SUPER}

EN AVANT-PREMIÈRE. Sortie le 17 octobre 2024

 SURFACING de Cléa KOFF

(Editions Héloïse d’Ormesson). 368 pages. Prix : 22€ Le résumé. 2003, Los Angeles. Un corps est retrouvé lors d’un chantier sur le campus de l’Université de Los Angeles. Craignant qu’il s’agisse de fragments archéologiques liés à un rituel Native American, le directeur fait appel à l’agence 32/1 : la séduisante Jayne Hall et sa meilleure amie Steelie Lander. Cette agence st spécialisée dans l’identification des cadavres et plus particulièrement des victimes de génocides. Tout à la fois médecins légistes, anthropologues et enquêtrices, les deux amies gardent de leurs missions au Kosovo et au Rwanda un souvenir brûlant. Pourtant, le corps du jeune étudiant, en réalité mort il y a moins de deux ans, n’a rien d’un vestige. Eric Ramos et Scott Houston, du FBI, vont être cosaisis – c’est alors qu’un second cadavre est découvert. Joignant leurs forces, les deux équipes se mettent sur la trace d’un tueur dont l’obsession pour la « pureté de la race » l’a entraîné dans une spirale de théories conspirationnistes fatale. Jayne Hall se va se retrouver dans la ligne de mire d’un assassin.
« Au début, il y a la découverte sur un chantier, du corps d’un étudiant, suivie de la découverte d’un nouveau corps. Mais la question est de savoir s’il s’agit d’une découverte relevant de l’archéologie, et s’il s’agirait d’Amérindiens. Et là, alors que la question des ethnies qui forment l’Amérique est étudiée très sérieusement, le Ku Klux Klan de sinistre mémoire refait surface. C’est livre intéressant et distrayant malgré le sujet, mais le comparer à un thriller glaçant, c’est un peu exagéré… »

Muriel Gaillard

  **** EMBRASSER MES ÉTOILES de Carole DECLERCQ

Éditions La Trace. Roman. 245 pages. Sortie prévue le 5 octobre 2024
Le résumé. Je suis née Cosa Nostra. J’ai grandi Cosa Nostra. Je respire Cosa Nostra. Je pleure mon père sans ressentir la révolte légitime que je devrais ressentir contre Cosa Nostra. Parce que c’est inscrit dans notre sang. Nous sommes marqués du sceau de Cosa Nostra à la naissance. Comme des bêtes à l’abattoir. En plein front. Mais nous seuls savons qu’il y a la marque, là, entre les deux yeux, comme une brûlure au fer rouge. Nous avons soin de ne la montrer à personne. Nous n’aurons donc droit à la compassion de personne au jour du Jugement dernier.
« Quel plaisir de lire ce livre ! Aussi bien pour son écriture où chaque phrase et chaque mot sont à leur place, toujours glissés en rythme et d’une manière percutante. Mais aussi pour l’histoire, et quelle histoire ! Celle de la Cosa Nostra où habituellement on ne regarde que les mafieux et les parrains qui tirent les ficelles et récoltent les fruits de leur organisation destructrice basée sur la menace, l’intimidation, la violence, le racket... Mais là, Carole Declercq s’intéresse à leur entourage et à toutes ces femmes qui très jeunes portent le deuil. Et surtout aux enfants qui gravitent dans ce milieu très noir avec des assassinats sordides à la pelle, avec ces « morts bus par le soleil » car non-retrouvés. Et arrive l’histoire (bien réelle à Palerme mais modifiée pour la circonstance) de cette fille qui décide d’arrêter ce cycle infernal et annonce qu’elle va tout raconter à la Police. Mais la Cosa Nostra veille, et à elle seule, sèmera encore plus de morts, jusqu’à sa propre mort. Un livre à lire absolument ! »

Muriel Gaillard

  **** EN ATTENDANT LE DÉLUGE de Dolores Redondo

(Gallimard). 560 pages. Prix : 21€. Sorti le 15 août 2024. Traduction : Isabelle Gugnon.
Le résumé. À l’origine de ce roman époustouflant, des faits réels : entre 1968 et 1969, celui que la presse écossaise a surnommé Bible John tua trois jeunes femmes rencontrées dans une discothèque de Glasgow et disparut. En 1983, Noah Scott Sherrington, policier obsédé par Bible John depuis près de quinze ans, s’apprête à l’arrêter sous une pluie torrentielle quand il est foudroyé par une crise cardiaque. À peine remis, écoutant son intuition et résistant aux injonctions des médecins et de sa hiérarchie, il suit la piste du meurtrier jusqu’à Bilbao, port où s’active secrètement l’ETA. Alors que les fêtes patronales de l’Aste Nagusia battent leur plein, des jeunes femmes sont assassinées à la sortie de discothèques... Noah, enquêteur tenace et doté d’un coeur fragile, au sens propre comme au figuré, a-t-il enfin retrouvé sa cible ? Les terribles inondations qui vont bientôt ravager la ville feront-elles obstacle à son projet ?
« La prémonition pour credo, l’intuition pour stratégie ainsi que mêler des faits objectifs à des sensations subjectives, telle était pour Noah Scott Sherington, la meilleure façon de se forger une opinion sur un endroit. Ce qui en respire...Ce que l’on ressent dans un lieu potentiellement habité de drames pour ce policier obsédé par le sérial killer mythique qu’était réellement Bible John dans les années 1968-69. Un tueur dont personne n’avait jamais vu le visage ; pas même un portrait-robot s’en approchant. Tout commence en Ecosse, à Glasgow, à Dundee… dans la brume, le vent, les tempêtes, la vase, la boue, des fantômes semblant sortir des vagues déchainées… puis à Bilbao au Pays Basque espagnol par la grâce de Dolorès Redondo auteure espagnole de la Série noire chez Gallimard, qui se revendique comme une écrivaine de la tempête. Et effectivement, sa plume nous entraine sur les océans, auprès des marins au long cours, ceux qui naviguent sur ces grands vaisseaux de commerce et les porte-containers capables de tout transporter même l’inimaginable. Et ce flic tout-terrain au corps qui ne le suit plus, marchant à la nitroglycérine pour cause de défaillance cardiaque congénitale, se lance pourtant à corps perdu tel un kamikaze à la poursuite de son obsession : Bible John ! Dolores Redondo que je n’avais jamais lue nous entraine alors dans un road-trip sans répit à travers Bilbao sur les pas de ce serial-killer inventif, rusé, meurtrier d’une vingtaine de femmes. Et toutes au moment où elles avaient leurs règles. Mais pourquoi ? c’est là que réside l’indicible et folle question qui taraude notre enquêteur. Un livre haletant qui nous laisse à bout de souffle. J’ai vraiment découvert une très légitime écrivaine de la tempête. Force 4 ! »

Jean-Pierre Tissier

  *** LE BAL DES CENDRES de Gilles Paris.

(Mon Poche) Prix : 8,90€. Sorti le 22 août 2024. Le résumé. Lior, Thomas, Sevda, Anton, Ethel et bien d’autres passent leurs vacances à Stromboli, à l’hôtel Strongyle, dans l’intimité de ce lieu paradisiaque géré par un Français, Guillaume, et sa fille adolescente, Giulia. Ils sont sensibles, lâches, infidèles, égoïstes, enfantins. Elles sont fortes, résilientes, légères, amoureuses. Le volcan, menaçant et imposant, n’est pas seulement dans la montagne. Il est en chacun d’entre eux. Lorsqu’il gronde et que la vie ne tient plus qu’à un fil, que les mystères les plus sombres remontent…
« Vivre sur une île est une vie à part où les rapports humains sont souvent particuliers et les suicides nombreux, que l’on soit à Ouessant, Sein, Man, en Corse, en Sicile… ou sur Stromboli, au pied du volcan où les entrailles de la terre explosent et crachent régulièrement des torches enflammées à l’image des coulées de lave ayant recouvert Pompéi et ses habitants pour l’éternité. Ils - et elles – sont sept ! Sept personnes autant en vacances qu’en villégiature, mais avec tous des attaches à ce lieu posté sous les ténèbres du géant et où monter vers le sommet est un sport palpitant, mais non sans danger. Car on ne grimpe pas vers les enfers avec de simples baskets et sans casque. « Le Bal des cendres » se marie fort bien avec le format Mon Poche car cette petite saga est agréable à lire et ressemble à un carnet de notes personnelles où chacun fait part de ses sentiments. Humeurs et amours dans un cadre idyllique mais sauvage, car le Stromboli comme une bombe à retardement en suspens veille et se manifeste sans prévenir. Escalader ce sommet comme une quête vers le Graal est un rituel excitant qu’il faut surtout ne pas aborder de face mais plutôt comme les cyclistes du Giro via une série de lacets virevoltant vers le cratère. Et là, dans cette montée en forme de rituel des regards se croisent, des amitiés naissent, des amours aussi pour le pire et le meilleur. Un excellent livre pour rêver sur une plage hors de portée du Stromboli. »

Jean-Pierre Tissier

  ** * À LA RECHERCHE DU PLAISIR PERDU de Gabrielle Lazure.

Editions Héloïse d’Ormesson. Sortie le 3 octobre 2024. Prix : 20€.
Gabrielle Lazure comédienne et écrivain est la fille de Denis Lazure, psychiatre et homme politique québécois. Elle a notamment joué dans La Belle Captive (Alain Robbe-Grillet), La Crime (Philippe Labro), Les Rivières pourpres 2 (Olivier Dahan) ... C’est son premier roman. Le résumé. « Tromper son mari ce n’est pas la fin du monde », claironne un site de rencontre extra-conjugale. Nancy, la soixantaine épanouie, s’interroge. Elle dont le mariage s’étiole, elle la sage libraire, osera-t-elle franchir le pas ? Avide de se sentir de nouveau désirée, Nancy prend le problème à bras-le-corps et s’inscrit sur une appli. Les profils d’hommes défilent sous ses doigts, tous plus séduisants les uns que les autres. Cela paraît si facile, il n’y a plus qu’à croquer la pomme... Dans ce roman libertin et sans tabou, Gabrielle Lazure décortique le plaisir avec une sincérité et une pulsion de vie aussi décomplexées qu’enivrantes.
« La B.O du livre de Gabrielle Lazure que l’on a pu voir dans de nombreux polars, est à son image ; très seventies ! Les Beatles y côtoient Neil Young, Bashung à ses débuts, et le torride « Je t’aime moi non plus » du duo Birkin-Gainsbourg. Un slow langoureux, libertin et sans tabou à l’image de ce livre plutôt très hot et cru, mais à ne pas laisser trainer sur le guéridon…s’il y a des petits enfants dans la maison ! Car on est là dans le porno de Canal + version années 90. Nancy, mariée, deux enfants, et la soixantaine toujours seyante aimerait bien retrouver le temps de ses vibrations anciennes côté corps, bien plus que côté jardin. Et elle est prête à tout pour faire vibrer l’instant présent écrit-elle, définissant ainsi sa nouvelle vision du bonheur. Mais l’amour, même avec les réseaux sociaux et les sites de rencontres les plus simples ou sophistiqués reste une affaire compliquée, même si la chose reste simple depuis la nuit des temps. Car aujourd’hui on ne sait pas qui se cache derrière la carapace du beau et jeune mâle bodybuildé, et au pays des libertins, il faut néanmoins toujours être sur ses gardes. Car les arnaques sont légion. Notamment avec ces inattendus « brouteurs », ces imposteurs camouflés – souvent établis au Sénégal – qui empruntent des profils et des photo-montages, créent la confiance et arrivent finalement à extorquer beaucoup d’argent à des femmes seules (ou pas ?) tombées amoureuses, sans jamais avoir vu à qui elles ont affaire, et qui un jour doivent avancer de l’argent pour financer l’opération en Urgences d’un enfant ou une chimio thérapie. Car ils savent jouer du pathos sur la corde sensible du violon les bougres, et souvent comme Nancy bien des femmes un peu trop naïves mordent à l’hameçon. Bref, de plans Q en plans B, la libraire franco-québécoise trouve l’addition lourde, mais reste déterminer à connaitre encore l’empire des sens, et même découvrir de nouvelles voluptés. Elle essaie tout Nancy, un peu comme Emmanuelle des seventies, sans trop changer sa vie semble-t-il… Mais la fiction sait aussi offrir des miracles. Comme au foot, dans le « money time ».

Jean-Pierre Tissier

 EN COURS DE LECTURE

 TRAUMA(S) LE DERNIER KARINE GIEBEL !

Editions Récamier Noir. 760 pages. Prix : 36,99€. Sortie le 10 octobre 2024.
Le résumé. Avec Trauma(s), Karine Giebel met un point final à son roman Et chaque fois, mourir un peu. Après des années sur le front sans arme ni gilet pare-balle, après des années à soigner les autres au péril de sa vie sous l’égide de la croix rouge internationale, après avoir pris de plus en plus de risques jusqu’au risque de trop, une autre guerre attend Grégory. Lors d’une dernière mission en Afghanistan les rôles s’inversent : les humanitaires deviennent des cibles. Après tous les combats qu’il a menés, Grégory va devoir sauver sa propre vie et celle de ses collègues…

« L’ENFANT QUI SEMA LA MORT » de Auguste Corteau (Belfond Noir). 208 pages Sorti le 26 septembre 2024. Le résumé. À Chryssodéndri, village enclavé près de la frontière turque, le temps s’est arrêté un matin de septembre. Depuis qu’Antónis, dix-sept ans, est entré dans la salle de classe, a tiré sur ses camarades et son professeur avant de s’immoler par le feu. Douze morts, et cette question : pourquoi ce carnage ? C’est ce que se demande Fíllipos Séxtos, tenancier de bar athénien et auteur dilettante. Amateur de récits de vie, Fíllipos écoute les gens pour les comprendre. Et le cas du jeune Antónis l’intrigue. Pourquoi un garçon qui veut se suicider fait-il le choix d’entraîner ses amis avec lui ? La vengeance serait-elle le mobile, comme le croit la police ? Pourtant, ce jeune athlète était sans histoires… De la mère du tueur aux parents de sa petite amie plongée dans le coma, en passant par le fou du village, Fíllipos frappe à chaque porte pour percer le mystère d’Antónis. Saint incompris ou monstre en puissance : qui était cet enfant qui a plongé tant de familles dans les ténèbres ?

MAMAN S’EN VA-T-EN GUERRE de Dorothée Olliéric (Editions du Rocher) Sorti le 4 septembre 2024. 304 pages Prix : 19,90€
Le résumé. « Il y avait une urgence à écrire ce livre et je suis heureuse d’expliquer pourquoi « Maman s’en va-t’en guerre » dit Dorothée Olliéric. En ce qui me concerne, c’est pour la passion du reportage… et le besoin viscéral d’être là où l’histoire est en marche ! Il y a bien sûr des moments dangereux, mais des rencontres inoubliables… Un livre attendu avec impatience par Blues & Polar qui avait recueilli les confidences de Dorothée Olliéric Grand reporter à France Télévision l’an dernier, après ses reportages en Afghanistan et sur le front de guerre en Ukraine. Dorothée c’est au-delà du reportage puisqu’elle s’investit également pour les femmes afghanes personnellement.


 NOUVEAUTÉS

 LES GUERRIERS DE L’HIVER de Olivier NOREK

(Michel Lafon) Sorti le 22 août 2024. Le résumé « Je suis certain que nous avons réveillé leur satané Sisu. Je ne parle pas leur langue, camarade, s’excusa Molotov. Et je ne pourrais te traduire ce mot, car il n’a d’équivalent nulle part ailleurs. Le Sisu est l’âme de la Finlande. Il dit le courage, l’obstination, le cran, la force intérieure, la ténacité, la résistance, la détermination… Une vie austère, dans un environnement hostile, a forgé leur mental d’un acier qui nous résiste aujourd’hui. » Imaginez un pays minuscule. Imaginez-en un autre, gigantesque. Imaginez qu’ils s’affrontent. Au cœur du plus mordant de ses hivers, au cœur de la guerre la plus meurtrière de son histoire, le peuple finlandais se dressa contre l’ennemi, et parmi ses soldats naquit une légende. La légende de Simo Häyhä, la Mort Blanche.

 « MÉFIE-TOI » DE HARLAN COBEN (Belfond noir)

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Roxane Azimi). Parution le 3 octobre.
Le résumé. Il y a trois ans, Myron Bolitar prononçait l’oraison funèbre d’un de ses clients, le légendaire coach de basket Greg Downing. Ces deux-là avaient connu des hauts et des bas : d’abord rivaux sur les parquets dans leur jeunesse, ils étaient devenus associés quand Myron avait lancé son affaire d’agent sportif. Et puis la vie les avait éloignés, jusqu’au décès de Greg. D’où la stupeur de Myron de recevoir la visite de deux agents du FBI qui lui demandent des nouvelles du défunt. Plus étonnant encore : l’ADN de Greg a été retrouvé sur le corps d’un homme quelques jours plus tôt. Serait-il encore vivant ? Aurait-il simulé sa mort ? Pourquoi ? Myron a besoin de réponses. Avec l’aide de Win, son fidèle acolyte, Myron va partir sur les traces de celui qu’il croyait connaître, pour une enquête de tous les dangers…


 ON A RELU

  *** TROIS JOURS D’ENGASTE de Philippe Carrese

Sorti en 1994 chez Méditorial (Corse) puis en 1999 chez Fleuve Noir. 191 pages. Le pitch : Quand Bernard Rossi s’est levé ce matin-là, ça n’allait pas très fort. Milhoud s’était tué en moto le jour d’avant et sa voisine, Madame Mostagonacci, ne lui avait pas ouvert sa porte pour son petit café du matin. Pour cause ! Elle avait été écrasée la veille par un chauffard. Bernard veut alors absolument savoir à quoi ressemble ce jobastre. (...) C’est le début d’une course folle qui durera 72 heures. Au cours de ces quelques heures, un immeuble sera dynamité, des voitures cassées, un homme égorgé, plusieurs autres tués par balles... Le pauvre Bernard, qui n’en avait pas tant demandé, se retrouve mêlé à une histoire politicienne qui le dépasse largement. Trois jours d’engatse est le premier roman de Philippe Carrese, et déjà on y retrouve les éléments incontournables : le « parler marseillais » bien sûr, l’humour mordant, les personnages décrits avec beaucoup de minutie, les actions qui s’enchaînent à une rapidité vertigineuse... Mais surtout il y a Marseille. Marseille en long, en large et en travers. Philippe Carrese nous offre une visite guidée, drôle, critique, grinçante, mais aussi tendre et inquiète.
« Relire l’ami Philou aujourd’hui, sur un coup de spleen, cinq ans après son décès en mai 2019 est un moment de tendresse et de franche rigolade qui fait du bien après cet épisode électoral dominical qui en a surpris plus d’un et sur lequel la plume vive et mordante du marseillais-napolitain nous aurait apporté son lot d’engaste à venir, façon madame Irma. C’est en cherchant où étaient les calissons que je suis tombé sur ce vieil exemplaire écrit par le parrain historique de Blues & Polar toujours présent à notre festival depuis l’origine. Trois jours d’engaste... et trois jours de marade ! On pense très fort à toi Philippe ! Le Carrese & friends gravé pour toujours dans nos cœurs ! »

Jean-Pierre Tissier

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 MES 3 LIVRES DE CHEVET

Ces bouquins attachants dans lesquels on peut se plonger au petit bonheur d’une phrase, d’une anecdote, d’une vérification historique, d’un poème... car il y a forcément un peu de nous-mêmes.

  **** LE DICTIONNAIRE AMOUREUX D’ALBERT CAMUS par Mohamed Aissaoui.

Editions Plon 528 pages. Prix : 28 € Sorti le 2 novembre 2023. Mohammed Aïssaoui s’est construit avec l’œuvre d’Albert Camus. Il nous livre ici « son » Camus, celui qui illumine sa vie, qui élargit le cœur et l’esprit, qui console des chagrins du monde. Avec la complicité de Catherine Camus qui lui a donné accès à des documents exclusifs.
« J’ai longtemps pensé que j’étais le seul au monde à connaître Albert Camus, à le comprendre, et qu’il n’écrivait que pour moi. Camus, c’est mon père, mon frère, mon professeur, mon ami. Il me console des chagrins de l’existence. Avec lui, je ne me sens jamais seul. Je le comprends mieux que quiconque. Nul n’avait vécu ce que lui et moi avions vécu : la pauvreté, le vertigineux écart social entre notre milieu d’origine et celui auquel nous avons accédé, la mère analphabète qui ne lira jamais les livres que nous avons écrits, la honte, la condescendance. Mais également le douloureux écartèlement entre deux pays, deux mondes : la France et l’Algérie. Je croyais qu’il avait pris sa plume pour me dire : « Tu vois, tu n’es pas seul. » Plus tard, j’ai compris que Camus n’était pas qu’à moi ! Nous sommes des milliers, des millions même, à l’aimer. Il est de ceux qui élargissent le cœur et l’esprit. Dans ma vie de journaliste, le moment le plus décisif a été la rencontre avec sa fille, Catherine, à Lourmarin, dans le Luberon. Elle m’a ouvert à l’écrivain mais aussi et surtout à l’homme qui était son père. Je la considère comme ma sœur. Alors, ce Dictionnaire amoureux, je ne pouvais pas le faire sans elle, sans sa complicité. Je la remercie, ici, pour ses confidences, sa générosité et son hospitalité. »


  **** L’ARRANGEUR ARRANGÉ de François Bréant

(Editions MaÏa) Prix : 29 €. 450 pages.
le pitch. François Bréant est arrangeur, réalisateur, compositeur et claviériste. Il a collaboré avec Bernard Lavilliers, Enzo Enzo, Kent, Salif Keita, Michel Fugain, Pierre Vassiliu, Jean-Pierre Mader, Alain Bashung, Hubert-Félix Thiéfaine, Ariel Zeitoun, Jacques Rivette et des centaines d’autres.
En cent cinquante-deux anecdotes tour à tour hilarantes, instructives, insolites, parfois émouvantes, François Bréant retrace son parcours de musicien en quête d’une vie « pas normale ». En studio, en scène et en tournée, il raconte ses tribulations dans ses groupes de rock et ses rencontres avec des personnages extravagants, célèbres ou anonymes, géniaux ou pas. Sarcastique mais jamais amer, François Bréant, sourire en coin, vous fait visiter les arrières cuisines son métier bien-aimé. A la fin des anecdotes, agrémentées de photos inédites, on peut scanner un QR code qui permet d’entendre les musiques concernées. Un livre à lire et à entendre.


  **** TRAGÉDIE FRANÇAISE

  HISTOIRE INTIME DE LA Ve RÉPUBLIQUE (TOME 3) de Franz-Olivier Giesbert

Editions Gallimard Sorti le 2 Novembre 2023. Prix : 22€. 500 pages.

Le résumé  : « Dans Le Sursaut, j’ai raconté le redressement gaulliste de 1958, et dans La Belle Époque, la gestion de « mère de famille » des années Pompidou et Giscard explique Franz-Olivier Giesbert »Parrain historique de Blues & Polar avec René Frégni - C’était un autre siècle. Mais les décennies suivantes, que j’essaie de faire revivre ici, celles de Mitterrand, Chirac, même Sarkozy et Hollande, nous paraissent elles aussi lointaines, avec leurs promesses et leurs ombres : bicentenaire de la Révolution, chute du Mur, 11 Septembre, irruption des « lieux de mémoire » et éclatement concomitant de notre roman national... Mitterrand prétendait « changer la vie » en 1981. Onéreuse illusion. La présidence Chirac s’est enrayée sitôt commencée, marquée pourtant par quelques décisions mémorables
. Le repli s’est poursuivi, bon an mal an, sous leurs successeurs, qui n’ont pas toujours démérité. La France n’a certes pas encore touché le fond, mais elle s’est laissée aller, au point de ne plus maîtriser ni ses comptes publics ni ses flux migratoires. Sans oublier le délitement de l’autorité qui ronge nos âmes, notre industrie qui se défait, comme notre moral, et la juxtaposition des ghettos communautaires sous l’égide du « vivre-ensemble ». Ce qui n’empêche ni les plaisirs, ni les rires, ni les joies, ni les chansons de Véronique Sanson et de Francis Cabrel qui égaient notre vie, ni la nostalgie de ceux qui nous ont quittés sans jamais partir - Aragon, Barbara, Johnny Hallyday, Belmondo... Puisant dans mes carnets et le Journal que j’ai tenu pendant des années, j’ai voulu raconter comme je l’avais vécu ce temps de faux espoirs et de vraies ruptures, dans un va-et-vient entre nos perceptions d’alors et notre regard d’aujourd’hui. Avec la conviction qu’il n’y a jamais de fatalité en histoire."

Jean-Pierre Tissier